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Homélies du mois de septembre

Le 11 septembre 2022, Don Xandro


En Autriche, mon pays natal, lorsque l’empereur mourrait, le cortège du cercueil allait jusqu’à la crypte des Capucins, le héraut de l’empire frappait alors à la porte et demandait la permission d’entrer pour l’enterrement. De derrière cette porte close, la voix d’un Capucin résonnait

- Qui est là ?

Le héraut répondait en reprenant tous les titres de l’empereur :

- François-Joseph, empereur d’Autriche, roi de Hongrie, roi de Bohème, comte de Tyrol, roi de Jérusalem…

- Je ne le connais pas, qui est là ?


On simplifiait alors une peu la réponse :

- François-Joseph, archiduc d’Autriche

- Je ne le connais pas, qui est là ?

- François-Joseph, un pauvre pécheur !


De la même manière, aujourd’hui, saint Paul s’introduit ainsi :

Je suis le premier des pécheurs !


Sans prétention, c’est ainsi que je voudrais me présenter :

Xandro, pauvre pécheur, à qui le Seigneur a fait miséricorde, comme il fit miséricorde à tant d’autres au cours de l’Histoire.

Né à Vienne, ville impériale, je suis arrivé en France à l’âge de 19 ans pour suivre des études de philosophie dans ‘la ville des lumières’. Pensant à l’époque devoir un jour nourrir une famille, j’ai rejoint l’Angleterre pour intégrer une école de commerce, puis, à 24 ans je suis entré au séminaire de la Communauté-Saint-Martin et fus ordonné prêtre à l’âge de 31 ans.

Pendant six années, j’ai exercé mon ministère de prêtre à la cathédrale de Soissons au service de la jeunesse mais aussi en tant que vicaire paroissial. A présent, je suis très heureux de pouvoir partager ces prochaines années avec vous dans cette autre cathédrale picarde !


Comme saint Paul, comme moi-même, comme beaucoup d’entre vous, nous avons fait l’expérience de la miséricorde de Dieu et nous savons à quel point elle est grande. Avec tout le poids de nos péchés, voilà que nous entendons ces magnifiques paroles :

Je te pardonne, au nom du Père, et du Fils, et du Saint-Esprit


A ce moment-là, une vie peut basculer, dans mon cas, ma vie a basculé et je suis devenu prêtre.


Souvenez-vous, lorsque les quatre amis portent le paralytique et le font descendre par le toit, Jésus dit : « Tes péchés sont pardonnés ». Les Pharisiens se disent alors que seul Dieu peut pardonner et ils mettent en doute ses paroles, ce qui n’empêche pas Jésus de guérir le paralytique : « Lève-toi, prends ton brancard et marche ! ».


Même si nous sommes tous convaincus de la beauté et de la grandeur de la miséricorde, ne nous arrive-t-il pas, à nous aussi, de penser qu’il est facile de dire que nos péchés sont pardonnés, mais est-ce vraiment suffisant à enlever notre souffrance ?

Bien sûr que nous souffrons de notre péché, bien sûr qu’il s’agit d’un soulagement et d’une libération le jour où le Seigneur nous pardonne, mais il ne s’agit pas des seules souffrances que nous avons à traverser durant notre vie sur terre :

- Pour un enfant dont les parents sont en train de divorcer, entendre que le Seigneur peut pardonner ses péchés lui permettra-t-il d’apaiser sa souffrance ?

- Une mère, dont l’enfant est gravement malade, sera-t-elle soulagée par cette nouvelle ?

- Face à la dépression d’un proche, la perte d’un travail, la souffrance des enfants dans le monde…que nous apporte le pardon de Dieu ?


Parfois, nous sommes affligés par ces maux qui nous assaillent mais qui ne sont pas le fruit du péché : la maladie, une catastrophe naturelle ou la mort qui nous frappe tous un jour ! Nous pouvons alors être tentés de laisser cette petite voix en nous s’exprimer ainsi :


« C’est bien beau Jésus de pardonner mes péchés,

mais ce n’est pas là mon seul problème, je souffre de bien d’autres maux.

J’ai obtenu le pardon de mes fautes par la confession,

mais je souffre toujours,

je traverse des épreuves et je suis pris dans une impasse. »

Mais pourquoi donc cette souffrance ? Alors que Jésus peut tout guérir - la preuve en est avec la guérison du paralytique et la résurrection de Lazare. S’il ne s’agit pas d’un problème de pouvoir, c’est donc un problème de vouloir !

Pourquoi le Seigneur ne voudrait-il pas nous guérir de tous nos maux, et ne nous donnerait « que » le pardon de nos péchés ?

On peut exclure l’hypothèse de la méchanceté qui s’appuierait sur l’argumentation athée. En creusant davantage, on se dit alors que l’essentiel est de sauver son âme, le reste importe peu ! Mais le Seigneur est venu nous sauver tout entier, il ne peut en être autrement. Il est venu nous sauver de manière « radicale » (de radix, la racine). Oui, le Seigneur veut nous guérir de la souffrance et de l’épreuve, et, à la racine de tout cela, il faut bien le reconnaitre, il y a le péché !

Que provoque en nos cœurs un mal subi auquel l’on doit faire face, comme la maladie d’un enfant ?

Bien légitimement, dans ce type de situation, on se dit que la souffrance est bien présente. Dans le cœur d’un pécheur, c’est-à-dire dans chacun de nos cœurs, la souffrance provoque le repli sur soi, l’amertume, la rancœur, le mépris, la haine peut-être, envers ceux qui nous infligent ce mal. Nous nous enfermons alors dans la douleur, nous devenons insensibles à la souffrance des autres, et finalement, le désespoir nous gagne.

Au pied de la croix, la Vierge Marie a souffert, elle a connu la douleur de ce glaive qui transperça son cœur. Cette douleur, elle est de même nature que celle que nous ressentons, alors que son cœur est sans péché, il est rempli d’Amour. Dans le cœur de la Vierge Marie, dans le cœur de tous ces saints qui nous ont précédés, mais aussi dans le cœur de nombreuses personnes autour de nous, le Seigneur enlève le péché et le remplit de son Amour, la douleur peut alors devenir féconde.


Vous avez tous autour de vous certainement le cas d’une famille touchée par la mort prématurée d’un de ses membres. Si ces personnes n’ont pas laissé le mal les envahir, c’est-à-dire le péché, la rancœur, la haine, la dureté, le désespoir, mais, si au contraire, elles ont laissé la Foi, l’Espérance, la Charité, la confiance, l’Amour vaincre cette situation-là, cette famille s’est ressoudée, les liens se sont resserrés, un plus grand amour est alors devenu possible.


Mais ne tombons pas pour autant dans le cynisme ! La douleur est toujours un mal, la Vierge Marie a souffert, le Christ a souffert sur la Croix, chacun de nous a souffert ou connaitra un jour cette souffrance. La mort n’est pas rien, mais par le sacrifice de la messe, la mort peut être transformée, transfigurée en source de vie, le mal peut être vaincu. Tout mal physique, psychologique ou social, tous ces maux qui nous assaillent, toutes ces souffrances ne seront pas supprimés mais transformés par l’Amour. C’est cela que le Seigneur est venu nous apporter aujourd’hui par cette bonne nouvelle de la miséricorde de Dieu, de l’Amour victorieux !


A présent, posons-nous ces questions :

Quelle est peut-être cette relation où il n’y a entre l’autre et moi que mépris, amertume et haine, où je dois laisser le Seigneur mettre sa miséricorde pour transformer la relation ? Même si elle restera peut-être encore douloureuse à cause du passé, mais de laquelle un plus grand bien peut ressortir. Quelle est cette épreuve que je traverse où je dois laisser entrer l’Amour victorieux du Seigneur, afin de la dépasser par un surcroît d’amour ?


En venant nous sauver du péché, le Seigneur nous dit tout simplement :

Tu peux toujours aimer, quoi qu’il arrive,

car tu es toujours aimé, quoi qu’il arrive

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