Homélies de Juin 2025
- saint Jean-Baptiste
- 26 mai
- 4 min de lecture
Dernière mise à jour : 4 juin
Homélie de don Xandro
Le 1er juin 2025, 7e dimanche de Pâques, année C
La peur comme obstacle à la conversion
Dans mon chemin de foi personnel, mais aussi dans mon ministère d’accompagnement spirituel, j’ai constaté qu’un des plus grands obstacles à la conversion était la peur de changer : si je change, que deviendrai-je ? C’est particulièrement vrai d’un péché qui est devenu comme une seconde nature. On a peur de perdre son identité si on renonce à tel ou tel comportement, dont on sait pourtant qu’il n’est pas bon. Nous avons peur de perdre notre personnalité si nous nous convertissons. En effet, que reste-t-il du moqueur s’il cesse de se moquer ? Que reste-t-il du colérique s’il ne se met plus en colère ? Que reste-t-il de l’ivrogne s’il arrête de boire ?
Mais dans l’évangile du jour Jésus va plus loin. Il ne parle pas seulement de conversion, mais d’union à Dieu et entre chrétiens : « Qu’ils soient un comme nous sommes un » dit-il au Père. « Que je sois en eux, comme tu es en moi ». Cette unité radicale à laquelle Jésus nous appelle, unité qui est à l’image de celle qui existe entre le Père et le Fils, ne met-elle pas encore plus en péril notre identité, notre personnalité propre ? S’il faut devenir tellement un, comment rester soi-même ? Quand on en vient à dire avec saint Paul que « ce n’est plus moi qui vis, mais le Christ qui vit en moi », n’a-t-on pas perdu son identité ?
La théologie trinitaire comme clé de compréhension
Pour répondre à cette question, à cette peur qui nous empêche de nous convertir et de tendre à l’unité radicale avec le Christ et avec les autres, il faut suivre l’indice que Jésus lui-même nous a donné : il faut regarder l’être de Dieu, comment en Dieu le Père et le Fils sont un. Je vous demande donc une minute de concentration pour une plongée dans la théologie trinitaire.
En Dieu l’unité maximale coïncide avec la différence maximale. On ne peut imaginer de plus grande unité qu’entre le Père et le Fils. Et pourtant, la théologie nous dit qu’il n’y a pas de plus grande différence qu’entre le fait d’être Dieu le Père et Dieu le Fils. Le Père et le Fils ont tout en commun sauf, justement, le fait d’être Père et d’être Fils. Ce qui constitue le Père, c’est de ne pas être le Fils. Et ce qui constitue le Fils, c’est de ne pas être le Père. Ce qui fait qu’il y a des personnes en Dieu, c’est cette différence radicale. Leur différence, leur identité propre, fonde et rend possible leur unité.
Conséquences pour nous
Première conséquence : l’unité à l’image de celle entre le Père et le Fils ne met pas en danger ta personnalité propre, et vice versa : affirmer ton identité et ta personnalité propre ne met pas en péril l’unité ! Si tu te convertis et que tu t’unis au Christ au point qu’il vive en toi et que tu progresses vers l’unité parfaite avec les autres, cela ne nuira pas à ton identité. Tout au contraire : cette unité se fonde sur ta personnalité propre. Unité et différence, unité et identité grandissent ensemble.
Mon appel est donc le suivant : affirme ton identité profonde, sois vraiment toi-même et tu grandiras dans l’union à Dieu et à ton prochain. Et inversement : N’aies pas peur de te rapprocher de Dieu et du prochain et à chercher l’unité parfaite, tu n’y perdras pas ta personnalité, mais seulement ton personnage.
Deuxième conséquence : Ce qui empêche l’unité, ce n’est pas l’affirmation de notre personnalité, mais le personnage que nous avons endossé et qui est parfois devenu comme une seconde nature. Ce personnage est le fruit du péché. Tout ce qui est péché et comportement mauvais ne correspondent pas à ton identité profonde, à celui que Dieu a créé et voulu et destiné à la gloire du Ciel. Si le moqueur cesse de se moquer, il sera libéré d’un personnage et sa véritable personne pourra s’épanouir etc.
Si tu te convertis, tu ne perdras pas ta personnalité, mais seulement ce personnage qui est une prison, qui travestit ta véritable personne.
Ta véritable personne, celle qui se défait du personnage qui n’est que la conséquence du péché originel, ne met pas en danger l’unité. Donc quand tu renonces à ce personnage, n’aies pas peur de penser ce que tu penses vraiment, de vouloir ce que tu veux vraiment, bref : d’être pleinement toi-même. L’union à Dieu et aux autres ne sera que renforcée et au fur et à mesure qu’elle se renforce, tu deviendras toujours plus toi-même.
Distinguer l’être du comportement
Une dernière question surgit : Si chacun ne fait qu’à sa tête sous prétexte d’être soi-même, cela ne nuit-il pas à l’unité ? Non, si ce n’est pas le personnage, mais ta vraie personne, alors tu pourras, tout en étant pleinement toi-même et sans rien renier de ce qui fait ton identité, adapter ton comportement aux autres. C’est encore saint Paul qui nous dit qu’étant devenu une création nouvelle en Jésus-Christ il peut désormais se faire tout à tous. Notre identité réelle rend possible cette adaptation attentionnée, cette charité concrète qui se fait tout à tous.
Demandons à l’Esprit Saint de réaliser en nous ce miracle, de nous libérer de la peur de renoncer au péché et d’accéder à l’union radicale avec le Christ et les autres. Amen.
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